Après Covid : les villes moyennes pourraient tirer leur épingle du jeu


le Jeudi 3 Février 2022 à 18:11

Alors que la plupart des observateurs prévoyaient un retour vers les grandes métropoles, considérées comme plus attractives, il semble bien que la Covid-19 aient rebattu les cartes. Confinements et télétravail ont amplifié un processus déjà lancé bien avant : les Français ont envie de vivre dans un environnement offrant une meilleure qualité de vie. Comment les villes moyennes, à taille plus humaine, se préparent-elles à accueillir ces nouvelles populations ?


La Roche-sur-Yon (Vendéeé), un ville qui revitalise son centre pour le rendre plus attractif (photo Adobe Stock)
La Roche-sur-Yon (Vendéeé), un ville qui revitalise son centre pour le rendre plus attractif (photo Adobe Stock)
Nous observons un regain d’intérêt pour notre territoire depuis des années », explique Stéphanie GUIRAUD- CHAUMEIL Maire d’Albi et présidente de la Communauté́ d’agglomération de l’Albigeois « Et il s’est accentué ces derniers mois. Le télétravail est clairement une donnée qui impulse ce phénomène ». 
 
Bien sûr on peut aussi continuer à travailler dans une grande métropole et aspirer à vivre dans une petite ville à taille humaine, dans l’aire métropolitaine. « Dans ce cas, la proximité d’une grande ville devient un nouvel atout. Ce qui est le cas de notre territoire qui s’inscrit dans l’aire métropolitaine toulousaine », poursuit l’édile. 

Mais pour autant il ne faut pas opposer les territoires. « Nous sommes entrés dans la société de la mobilité », ajoute Jean-Yves CHAPUIS Urbaniste et professeur en stratégie urbaine. « Si les métropoles perdent des habitants, c’est surtout à cause des prix élevés du foncier. Si les villes moyennes ont le vent en poupe, c’est aussi parce que les villes n’arrivent plus à répondre à toutes les demandes de logement ».
 
Outre le fait qu’il était plus agréable de vivre confiné dans une petite ville de bord de mer ou dans un village rural, avec un risque moindre de contracter le virus, bon nombre de citoyens ont compris que les grandes métropoles n’offraient pas une assez grande qualité de vie. Certes le prix du foncier y grimpe plus vite qu’ailleurs et les logements accessibles aux classes moyennes sont de plus en plus rare, les villes moyennes et petites ne sont pas en reste. Le départ de franciliens dont les salaires sont souvent plus élevés que sur les territoires ruraux ou péri-urbains, ont contribué à faire grimper le foncier des villes moyennes. Mais cela n’arrête pas pour autant l’exode.
 
Si les villes moyennes, situées le plus souvent à quelques encablures d’une grande métropole, ont un attrait évident, il faut cependant nuancer le propos, comme le fait Vincent PAVANELLO, Fondateur et président de Real Estech, une association qui fédère et promeut l’ensemble des acteurs de l’innovation dans le secteur immobilier : « Même si le confinement a donné envie à certains de s’exiler des grandes villes, l’exode urbain décrit par les médias n’est pas si évident à quantifier et il semble aujourd’hui certain que les métropoles vont continuer d’attirer de plus en plus d’habitants, peut-être moins dans les villes-centres, mais leur croissance va se poursuivre ». 
 
« Pour éviter que l’accélération du phénomène ne soit suivie d’un brusque coup de frein, les élus des villes moyennes doivent plus que jamais réunir toutes les conditions pour l’amplifier »
Sans doute allons-nous assister, dans les prochaines années à un chassé-croisé entre ceux qui veulent vivre au vert et ceux qui veulent revenir dans les grandes villes pour ce qu’elles offrent de services et d’avantages sur le plan social. D’autant que l’augmentation du prix de carburants, pourrait tout à fait contredire d’éventuel départ vers les territoires. Tout dépendra de la capacité de ces grandes métropoles à revoir leur politique en matière d’urbanisation et d’environnement. Mais pour l’heure les villes moyennes ont une carte à jouer et elles sont bien décidés à profiter de cette manne que leur offrent ceux qui ont décidé de se mettre en retrait des grandes métropoles, même s’ils y travaillent.
 
« J’ai moi-même été élu maire en juin 2020 sur le slogan « Avec vous, Saint-Dizier a de l’avenir » lequel fait écho à ce regain d’attractivité pour les villes moyennes », souligne Quentin BRIÈRE Maire de Saint-Dizier « Pour éviter que l’accélération du phénomène ne soit suivie d’un brusque coup de frein, les élus des villes moyennes doivent plus que jamais réunir toutes les conditions pour l’amplifier ». 
 
À l’heure où la crise sanitaire semble avoir modifié le paysage urbain, les équipes municipales s’attèlent à la dynamisation de leur centre-ville ou plus largement au retour des commerces de proximité́ comme c’est le cas à Hellemmes (59), une cité de 18 000 habitants associée avec Lille, la grande métropole du Nord, depuis 1977. Reliée par une ligne de métro à Lille et distante, d’à peine trois kilomètres du quartier des gares Lille-Flandre et Lille-Europe, Hellemmes doit se battre pour exister face à son imposante voisine et ne pas être considéré comme une simple ville dortoir. 
 
Pour cela la ville, qui a valeur d’exemple en matière de gestion des villes moyennes, adopte le concept de « ville du quart d’heure ». La ville du quart d’heure, un concept cher à Carlos Moreno, est un modèle idéal de ville où tous les services essentiels sont à une distance d’un quart d’heure à pied ou à vélo. 
 
« favoriser l’attractivité et la qualité de vie du territoire de l’agglomération » 

L’idée c’est de faire en sorte que tous les besoins de la vie quotidienne des habitants soient satisfaits, en développant la notion de village, au sein même de la ville. Les habitants pourront se loger, travailler, se soigner, faire leurs courses, et se cultiver. L’attractivité́ commerciale en constitue souvent l’un des principaux piliers. Les habitants ne seront attirés par le quartier que s’ils savent qu’ils pourront y retrouver les commerces de proximité́ dont ils ont besoin. Idem pour les commerçants pour lesquels il n’est pas question de prendre le risque de s’installer s’ils ne disposent pas d’un minimum d’assurance quant aux futures habitations à proximité́ ». 
 
C’est donc un marché gagnant-gagnant dans lequel les municipalités, en collaboration avec une Chambre de Commerce et d’Industrie, des urbanistes et professionnels de l’immobilier, doivent accompagner les professionnels qui envisagent de s’installer. Cela passe par une aide financière à l’installation ou une franchise de loyer pour les premiers mois, le temps de laisser au commerçant de s’installer et faire sa clientèle. Les élus veillent aussi à la vacance commerciale et à la diversité des enseignes : trop de rideaux baissés, n’attirent pas la clientèle et les autres commerces. 
 
Si la Covid-19, rien n’a rien arrangé, pas question, pour autant, de se résigner à la morosité. À Hellemmes, comme ailleurs, les maires se retroussent les manches, aidés d’investisseurs privés ou publics. À La Roche-sur-Yon (85), le maire, Luc BOUARD, a ainsi signé une convention de partenariat visant à « favoriser l’attractivité et la qualité de vie du territoire de l’agglomération ». Son ambition : réactiver la fibre cœur de ville d’une agglomération dont le développement commercial s’était organisé en périphérie dans les années 1990 et 2000. « Pour cela, nous achetons des bâtiments dont nous optimiserons l’accessibilité pour accueillir notamment des métiers de bouche. Nous conduirons aussi des opérations mixtes incluant l’habitat pour faire revenir nos habitants, désormais soucieux de bilans écologiques dans leur cœur de ville », précise l’élu dans « Envies de ville » de décembre 2021, un magazine édité par société immobilière Nexity





              


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