Microforêts urbaines : une méthode japonaise pour reverdir la ville


le Lundi 29 Mars 2021 à 10:13

Après l’ère du bétonnage à outrance et au tronçonnage d’arbres malades ou envahissants, de plus en plus de collectivités qui prennent conscience de l’urgence climatique, réintroduisent le végétal au cœur des villes, sous forme de microforêts. Sous l’impulsion de l'entreprise belge Urban Forest une méthode de végétalisation originaire du Japon comme son concepteur : la méthode Wiyawaki commence à se déployer sur le territoire français.


Urban Forest intervient auprès des collectivités et association pour les conseiller dans la création de leurs microforêts (Photo Urban Forest)
Urban Forest intervient auprès des collectivités et association pour les conseiller dans la création de leurs microforêts (Photo Urban Forest)
Inutile de se voiler la face, le changement climatique et la disparition de la biodiversité que nous devons affronter sont dus au bétonnage et à la pollution des zones urbaines. Certaines collectivités qui ont compris que revégétaliser les villes permet de stocker du carbone, restaurer des habitats favorables à la biodiversité forestière et surtout, pendant les périodes de canicules, qui reviennent de plus en plus souvent, réduire l’effet de la chaleur et apporter de nombreux services dits écosystémiques aux habitants des villes se lancent dans des projets de microforêts. 
 
C’est une démarche vertueuse et pas seulement un effet de « greenwashing », qui commence à s’installer en Europe de l’ouest et notamment en France. Parmi les différentes méthodes de reboisement en site urbain, celle développée par le botaniste et phytosociologue japonais Akira Miyawaki suscite un réel engouement auprès de nombreuses associations citoyennes et l’intérêt des collectivités locales.
 
Contestée par l’INRAE qui se montre sceptique quant à l’efficacité de ces microforêts à la japonaise, comme le révèle un article sur The Conversation, de plus en plus de villes adoptent l’idée ou s’en inspirent, notamment dans les zones libres, pas assez grandes pour accueillir des ensembles immobiliers, ou en lieu et place de stationnements pour des voitures que d’aucuns espère moins nombreuses en centre-ville. Et même si ce n’est pas parfait, c’est toujours mieux qu’un parking en bitume. 

La « méthode Miyawaki », c’est quoi ?

La méthode Miyawaki consiste à s’inspirer de la composition naturelle des communautés végétales forestières, et des processus dynamiques spontanés dans les forêts, en réalisant des plantations denses et plurispécifiques de jeunes plants d’essences ligneuses, correspondant aux cortèges floristiques naturellement présents sur ces territoires.
 
Parmi les promoteurs de cette méthode, l’association Boomforest en propose une présentation schématique stylisée. De son côté, l’association Toulouse en transition fournit sur son site Internet un « Myawa’kit » en 6 chapitres, comportant toutes les données nécessaires pour créer une telle microforêt urbaine.
 
En fait pour créer une microforêt urbaine, il suffit de réaliser une plantation dense, de l’ordre de trois « arbres » (ou plutôt 3 jeunes plants ligneux) d’environ 30 à 60 cm de hauteur par m2 sur une superficie de quelques centaines de m2, cela après une importante préparation du sol – fertilisation organique par fumier, compost, apport de sciure. Il faut ensuite arroser et pailler, puis effectuer des retours réguliers les trois premières années pour le désherbage des adventices et l’arrosage.
 
Parmi les espèces habituellement plantées dans nos régions à climat tempéré, on trouve tout le cortège des arbres feuillus classiques : les chênes sessile et pédonculé, le hêtre, le charme, les érables sycomore, plane et champêtre, le frêne, les tilleuls à grandes feuilles et à petites feuilles, le merisier, l’alisier torminal, etc. Et aussi des arbustes comme les cornouillers mâle et sanguin, les aubépines monogyne et à deux styles, le troène, le fusain d’Europe, le sureau noir, des rosiers et ronces…
 
Au bout de trois ans, la plantation est considérée comme autonome, évoluant spontanément pour atteindre, selon ses promoteurs un aspect proche d’une forêt mature au bout de 20 ans, c’est-à-dire cinq à dix plus vite que ne le ferait une forêt « classique ».
 
On le comprend, le but est d’associer un grand nombre d’espèces de diverses essences ligneuses locales en vue de constituer des peuplements denses correspondant à la végétation naturelle potentielle du site. Les espèces et individus les mieux adaptés se maintiendront. 

Quelques exemples français d’inspiration Wiyawaki

Au bout de trois ans la microforêt est suffisamment dense pour que reconstituer un écosystème (Photo Urban Forest)
Au bout de trois ans la microforêt est suffisamment dense pour que reconstituer un écosystème (Photo Urban Forest)
A l’initiative de l’entreprise belge Urban Forest, spécialisée dans la création de « forêts urbaines participatives 100 % naturelles » une microforêt Wiyawaki a été mise en œuvre pour la première fois à Paris en mars 2018, par l’association Boomforest en partenariat avec la ville :  1 200 plants d’une trentaine d’espèces ligneuses ont été plantés sur une portion de 400 m2 d’un talus du boulevard périphérique à la porte de Montreuil (XXe arrondissement).
 
Une seconde opération du même type a été réalisée l’année suivante par le même organisme sur 500 m2 à la porte des Lilas (XXe arrondissement), puis en 2020, deux autres opérations ont été menées sur 200 m2 dans le quartier des Hauts de Malesherbes (XVIIe arrondissement) et sur 250 m2 sur le campus de l’université de Nanterre.
 
La même démarche a été menée par l’entreprise Trees Everywhere  avec la plantation, en novembre 2019 à Boursay (Loir-et-Cher), de 3 000 plants de 30 espèces ligneuses différentes sur une parcelle de 1 000 m2 ; puis, en décembre 2020, de 2 400 végétaux sur une autre parcelle de 800 m2 dans la même commune rurale. 
 
Des actions similaires de création de microforêts urbaines ont été lancées en mars 2020 à Toulouse (plantation de 1 200 plants de 22 espèces locales sur 400 m2), puis en novembre 2020 à Bordeaux sur 240 m2 à l’emplacement d’un parking, opération qui s’inscrit dans le cadre d’un ambitieux plan de plantation de pas moins d’un million d’arbres sur le territoire de la métropole bordelaise.  La région Grand Est est également fortement engagée dans cette dynamique grâce à l’association citoyenne Colibri Forest qui a entrepris, avec un budget de 3 000 euros, de planter 300 individus de 27 espèces ligneuses différentes sur une parcelle privée de 100 m² à Scharrachbergheim (Bas-Rhin). Plus récemment, un collectif de citoyens a proposé, en janvier 2021, sur le budget participatif de la ville de Strasbourg, un projet de plantation de 750 plants ligneux sur 250 m2 au beau milieu de l’avenue du Rhin.
 
L’opération la plus importante de cette région (et sans doute de France) vient d’être lancée fin février-début mars 2021 avec la plantation de pas moins de 24 000 plants ligneux de 40 essences différentes sur 8 000 m2 (une bande de 500 m de long et 10 à 30 m de large) le long de l’A36 au nord de Mulhouse.
 
(Source The Conversation)





              

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