Tendre vers le bâtiment idéal : le BEPOS


Rédigé par le Mercredi 22 Mai 2024 à 10:30

Toujours la même appréhension en ouvrant votre facture énergétique ?
Des particuliers aux collectivités, la part dans le budget des consommations d’énergie a subi une hausse massive ces 5 dernières années. Pour l'association des maires de France (AMF) et la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), ces hausses varieraient entre 30 et 300%. Pour sa part, Intercommunalités de France considère que la facture énergétique des 3/4 des intercommunalités a doublé, voire triplé ou quadruplé.
L'inflation énergétique est-elle une fatalité ou une occasion de repenser notre consommation bâtimentaire ?


Frugalité et changement des usages

Le premier réflexe afin de garder un budget stable malgré l’inflation est de réduire sa consommation, via ses usages. Le changement d’usage peut être imposé ou choisi et il n’est souvent pérenne qu’à la condition d’y tirer un co-bénéfice. 

Par exemple, la ville de Dieppe, au même titre que de nombreuses autres municipalités, a fait le choix de fermer la piscine municipale, trop gourmande en électricité. Il en résulte une dégradation des services de la ville. C’est un changement d’usage subi. A l’inverse, il est recommandé par les médecins d’abaisser la température de la chambre à 17C pour favoriser l’endormissement. Le corps humain a besoin de réduire sa température interne afin de basculer dans un sommeil profond. Dormir dans un environnement trop chaud perturbe la qualité du sommeil, essentiel à la récupération et peut provoquer des insomnies, des réveils nocturnes, ou des somnolences diurnes. Dans ce cas, le changement d’usage est accompagné d’un co-bénéfice sur la santé et le sommeil.

Isolation des bâtiments et rénovation des systèmes

L’autre levier d’action est d’améliorer l’isolation des bâtiments ou l’efficacité des systèmes de chauffage. Aujourd’hui, les structures (et équipements) sont catégorisées par deux indicateurs :
  • Leur classe énergétique, allant du A (<50 kWh/m²/an) au G (passoire énergétique, >400kWh/m²/an). La majorité des habitations en France sont dans les classes C, D et E. On peut dénombrer 5.2 millions passoirs énergétiques en France (F et G)
  • Leur classe climat, allant de A (<6kgCO2eq/m²/an) au G (<100 kgCO2eq/m²/an).
La preuve par l’exemple : une collectivité possède une infrastructure sportive (type gymnase, de surface 1000m²), construit en 1980, respectant le RE1974. Le bâtiment est probablement de classe E, disons 280kWh/m²/an, soit 280MWh/an et prenons un prix du MWh à 250€ (moyenne en 2024). La facture pour la commune sur ce bâtiment s’élève à minimum à 70 000€ (sachant que c’est un bâtiment de grande hauteur donc consomme généralement plus). Avec une rénovation selon la RE2020 (loi plus stricte sur les bâtiments et englobe plusieurs piliers de développement) et un système adaptatif qui gère le chauffage en fonction de l’utilisation de la salle (montée en température le matin, peu de chauffage lors des jours non occupés, gain estimé de 25%), le gymnase pourrait passer en classe B, disons 75kWh/m²/an. Nous arriverons à 21 000€/an soit une réduction de 70% de la facture ! Les travaux sont amortis rapidement.

Techniques de rénovation

Tout d'abord, il est essentiel d'optimiser l'isolation thermique des murs, des planchers et de la toiture en utilisant des matériaux performants tels que des isolants naturels ou des matériaux à haute résistance thermique (laine de bois, la laine de roche ou le polystyrène extrudé). Ensuite, l'installation de fenêtres à double vitrage ou triple vitrage avec des châssis (en bois, en PVC ou en aluminium) à rupture de pont thermique contribue à limiter les déperditions de chaleur. De plus, l'étanchéité à l'air du bâtiment doit être renforcée pour réduire les infiltrations d'air indésirables, notamment par l'application de produits d'étanchéité et la mise en place de systèmes de ventilation contrôlée. Enfin, l'utilisation de techniques de conception bioclimatique peut également jouer un rôle crucial en exploitant les apports solaires et en favorisant la ventilation naturelle pour réduire les besoins de chauffage et de climatisation (techniques architecturales telles que l'orientation optimale du bâtiment, l'utilisation de protections solaires, la conception de débords de toiture pour l'été, et la maximisation des apports solaires passifs en hiver).  
 

Tendre vers l’idéal : le BEPOS

Un bâtiment à énergie positive (parfois abrégé en « BEPOS ») est un bâtiment qui produit plus d’énergie (électricité, chaleur) qu'il n’en consomme pour son fonctionnement. Cette différence de consommation est généralement considérée sur une période lissée d'un an. Si la période est très courte, on parle plutôt de bâtiment autonome.

Vendu comme concept innovant et récent, le premier projet de BEPOS date de 1927 avec la Dymaxion House, de Richard Buckminster Fuller. Ne dépassant jamais l’étape du prototypage, ce projet est trop en avance sur son temps (Déconnexion des réseaux, habitat à structure légère, autonomie énergétique …).
 
Aujourd’hui, le Hangar 108, l’hôtel de la métropole de Rouen est le plus grand bâtiment public passif construit en France à ce jour (certifiée BEPOS et Passivehaus PLUS) de 6400m². 2000m² de panneaux solaires, pompe à chaleur sur sonde géothermique, ouverture des fenêtres sont automatisées pour maintenir 21 degrés à l’intérieur. Le bâtiment n’a besoin ni de chauffage ni de climatisation.
 
La ville de Paris a lancé un projet en 2014, nommé « Paris Smart City 2050 » où les cabinets d’architecte devaient rivaliser d’ingéniosité pour réduire de plus de 75% le bilan carbone de la capitale. Je vous laisse admirer le résultat !


« Les hommes n’acceptent le changement que dans la nécessité et ils ne voient la nécessité que dans la crise. » Jean Monnet, homme politique Français, contributeur de l’Europe Moderne


Nicolas COFFIN
Ingénieur de formation et passionné des questions & enjeux autour de l'environnement, j'ai le... En savoir plus sur cet auteur


              


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