Par Audrey Maurel, avocate spécialisée en droit public et marchés régulés - associée au sein du Cabinet Inlo Avocats
La généralisation des infrastructures de recharge pour véhicules électriques constitue à la fois un levier d’attractivité territoriale et un engagement fort pour l’avenir. La mobilisation sur le sujet est évidente puisque l’on dénombre plus d’une quarantaine de Schémas Directeurs de Recharge pour les Véhicules Électriques (SDIRVE) élaborés par des collectivités et syndicats d’énergie. Cette dernière se traduit par le recours soit à des appels à manifestation d’intérêt (financements privés), soit à des délégations de service public via des concessions.
Cependant, d’un côté, les collectivités aspirent à un service public fiable et accessible ; de l’autre, les industriels expriment des réserves liées à la rentabilité incertaine, la transition électrique étant plus lente que prévu.Dans ce cadre, comment parvenir à un maillage cohérent du territoire tout en protégeant
les investissements privés ?
Le modèle concessif : encore adapté ?
Le recours à la concession reste un réflexe historique en matière d’aménagement public. Ce modèle implique qu’un opérateur privé prenne en charge le financement, l’installation et l’exploitation des bornes, souvent en échange d’une exclusivité et parfois d’un soutien public.
Mais ce schéma, conditionné à l’absence d’initiatives privées spontanées, présente des limites. Le risque économique est particulièrement marqué en zones rurales, où la rentabilité tarde à se concrétiser.
Le recours à la concession reste un réflexe historique en matière d’aménagement public. Ce modèle implique qu’un opérateur privé prenne en charge le financement, l’installation et l’exploitation des bornes, souvent en échange d’une exclusivité et parfois d’un soutien public.
Mais ce schéma, conditionné à l’absence d’initiatives privées spontanées, présente des limites. Le risque économique est particulièrement marqué en zones rurales, où la rentabilité tarde à se concrétiser.
Cette situation rappelle celle du déploiement de la fibre en milieu peu dense, qui a nécessité un accompagnement financier étatique, comme le soulignait l’Autorité de la concurrence dans son avis de mai 2024.
Recourir à des outils sous-utilisés
Il existe pourtant des mécanismes juridiques et financiers permettant d’équilibrer les risques et de rendre les concessions plus attractives, notamment :
Il existe pourtant des mécanismes juridiques et financiers permettant d’équilibrer les risques et de rendre les concessions plus attractives, notamment :
- Les clauses de revoyure : elles autorisent l’ajustement des obligations (nombre de bornes, calendrier de déploiement…) selon l’évolution du contexte.
- Les aides financières : subventions à l’investissement ou à l’exploitation peuvent renforcer la viabilité des projets.
- Les redevances domaniales adaptées : symboliques ou progressives, elles moduleraient le coût de l’occupation du domaine public selon la fréquentation réelle du service.
Explorer des modèles complémentaires
Au-delà de la concession classique, d’autres solutions permettent d’avancer plus souplement :
Au-delà de la concession classique, d’autres solutions permettent d’avancer plus souplement :
- L’Appel à Initiatives Privées (AIP) offre une alternative souple : après mise en concurrence, les opérateurs proposent leurs projets sur fonds propres. Plusieurs territoires (Nancy, SIEDA, SDE Aube, Nantes…) ont déjà expérimenté cette voie avec succès, notamment pour combler les zones peu couvertes.
- Les montages hybrides ou « contrats mixtes » mêlant délégation de service public et intervention directe des collectivités permettent de répondre à un double objectif : fournir un service au public tout en satisfaisant les besoins internes des collectivités (agents, flotte publique…).
Ainsi, pour réussir le déploiement des infrastructures de recharge, il est crucial d’adopter une approche contextualisée et pragmatique. En adaptant leur stratégie juridique et économique selon les spécificités locales, les collectivités peuvent devenir les chevilles ouvrières d’une mobilité électrique accessible, équitable et durable. À l’image des politiques d’aménagement numérique ou de mobilité ferroviaire, cette transition peut devenir une réussite collective.