La voiture électrique meilleure pour le climat que son équivalent thermique


le Vendredi 3 Juin 2022 à 15:14

Désormais, tous les constructeurs automobiles ont une ou plusieurs voitures électriques à leur catalogue. Objet de méfiance pour certains, la voiture électrique interroge et le débat entre les défenseurs des modèles thermiques et électriques n’a jamais été autant animé. Alors faut-il investir dans un modèle électrique ou pas ? C’est la question que soulève le cabinet de conseil sur les enjeux énergie et climat « Carbone 4 », en tordant le cou aux idées reçues, avec une approche scientifique et chiffrée.


La recharge d'une voiture électrique permet de se reposer sur les longues distances (photo d'illustration Adobe Stock)
La recharge d'une voiture électrique permet de se reposer sur les longues distances (photo d'illustration Adobe Stock)
On ne le dira jamais assez, la prise de conscience écologique et climatique est l’affaire de tous, pas uniquement des gros pollueurs. Bien sûr, si ces derniers prennent des mesures pour réduire leur impact carbone, les résultats pourraient être spectaculaires. Mais nous avons tous notre carte à jouer, qui en les additionnant, pourraient être aussi spectaculaire. C’est le cas notamment pour l’automobile dont le nombre en circulation sur la planète impacte durement le climat. 

Pour autant, faut-il changer tout de suite de paradigmes et abandonner sa voiture thermique au profit d’une voiture tout électrique dont l’impact est considéré comme inexistant en exploitation. Ce qui n’est pas le cas dans sa fabrication comme le rappellent les défenseurs du moteur à explosion.

Comme le précise le cabinet de conseil sur les enjeux énergie et climat « Carbone 4  » : « l'empreinte carbone d’un produit est calculée en comptabilisant les émissions de gaz à effet de serre significatives sur l'ensemble de la durée de vie du produit, de l'extraction des matières premières à sa fin de vie ». 

Donc, pour calculer l’empreinte carbone d’une voiture, il convient de comptabiliser les émissions de gaz à effet de serre (GES) émises lors de l’utilisation du véhicule, mais aussi les émissions de GES émises en amont c’est-à-dire lors de la fabrication de la batterie, de la production d’électricité pour alimenter la voiture…, et, en aval, le traitement du véhicule en fin de vie, notamment le recyclage des pièces et de la batterie.

À ce jour, il est avéré qu’une voiture électrique a un impact carbone plus important que son équivalent équipé d’un moteur thermique. En effet, coté carrosserie et équipement du véhicule, l’impact est identique, mais dans le modèle électrique, c’est essentiellement la fabrication de la batterie qui fait pencher la balance.

Mais, comme le rappelle Carbone4 : « Ce serait un problème pour le climat si ce CO2e excédentaire n'était pas plus que largement compensé par les réductions d'émissions à l'usage. » 

Et c’est le cas puisque sur sa durée de vie, une voiture électrique émet globalement 3 à 4 fois moins de CO2e* que son équivalent thermique. Un argument qui penche en faveur de la voiture électrique, à partir de 30 à 40 000 km (soit 2 à 3 ans d'utilisation pour un usage moyen). C’est à partir de ce kilométrage, selon les chiffres avancés par le cabinet de conseil que « la voiture électrique devient meilleure pour le climat que son équivalent thermique ». 
 
D’autant plus intéressant qu’une voiture actuelle à une durée de vie d’au moins 200 000 km. Restent les véhicules qui roulent peu, comme le second véhicule de certains ménages pour faire les courses ou aller chercher les enfants à l’école, moins profitable sur le plan climatique. Mais le coût kilométrique des véhicules électriques peut inciter à les utiliser un peu plus. 

Comme le rappelle si justement le cabinet de conseil, les bénéfices climatiques de la voiture électrique ne sont pas identiques dans tous les pays. Tout dépend de l’impact carbone de la production électrique. Il est évident que le bénéfice est différent, entre une production électrique nucléaire, solaire ou solaire, comme c’est le cas en France et une production issue de centrales au charbon comme c’est le cas en Australie, en Chine ou en Pologne. 
 
« Il faut penser les voitures moins énergivores quel que soit leur type d’énergie, et pour cela les alléger. »

S’ajoute au bénéfice climatique : la masse du véhicule. Plus le véhicule est lourd, comme c’est le cas des SUV et surtout des véhicules tout-terrain plus l’énergie électrique à fournir sera importante et nécessitera des batteries qui augmenteront l’impact carbone. Il est donc aberrant de répliquer ces voitures en modèle électrique. Et si ces véhicules sont équipés d’un dispositif hybride (moteur thermique allégé et moteur électrique) avec des batteries rechargeables, c’est pire, car, compte tenu du poids, le moteur électrique sera peu sollicité.

« Il faut penser les voitures moins énergivores quel que soit leur type d’énergie, et pour cela les alléger », suggère Carbone 4. « Or, la tendance actuelle est à des véhicules de plus en plus gros et lourds, qui consomment plus. En 30 ans, la masse de nos voitures a augmenté de… 30 % en moyenne pondérée en France ». Il n’est donc par intéressant de transposer l’électrique dans des véhicules conçus pour des moteurs thermiques, mais plutôt de repenser totalement les véhicules, avec une structure plus légère, et plusieurs petits moteurs électriques (un par roues), comme l’ont imaginé certains constructeurs. 

Concernant les batteries, il a souvent été dit et écrit que ces dernières avaient un impact environnemental, hors carbone, du fait qu’elles utilisent des terres rares. « Pas si rares sur Terre et en quantité, comme le nickel ou le cuivre », précise le cabinet de conseil. « Aujourd’hui, il n’y a pas de terres rares dans la majorité des batteries qui équipent les voitures électriques, et certains moteurs électriques peuvent contenir des terres rares, mais des alternatives existent ». Reste le lithium, utilisé en quantité moindre et souvent extrait dans des conditions qui entraine une pollution environnementale, ou l’exploitation des populations locales. Mais là aussi des solutions existent. Ce qui est plus critique, c’est la dépendance énergétique puisque ces matériaux sont extraits hors de nos frontières. Idem pour la construction des batteries. 

Pour les batteries, l’autre question qui se pose, c’est le recyclage. « Contrairement à une idée reçue courante, les batteries Li-ion sont recyclables, actuellement à hauteur de 50 % par pyrométallurgie (en masse), et potentiellement jusqu’à 80-90% avec de nouveaux procédés hydrométallurgiques et mécaniques », souligne Carbone 4. « Pour autant, recyclable ne veut pas dire recyclé, et actuellement moins de 5 % des batteries Li-ion en fin de vie le sont. » 
 
La voiture électrique est récente, faut pour cela attendre que les batteries arrivent en fin de vie. Mais la filière s’organise et nul doute qu’elle sera opérationnelle dès lors qu’il y aura beaucoup plus de batteries à recycler. 
 
« 95 % des déplacements en voiture ne dépassent jamais 300 km pour l'écrasante majorité des français.es. »

Alors, opter pour une voiture électrique, est-ce judicieux ? Si le prix est souvent un obstacle, celui-ci doit diminuer au fur et à mesure que la production va augmenter, d’autant qu’une voiture électrique coute moins cher à construire, puisqu’elle nécessite moins d’équipement (pas de boite de vitesse, pas d’embrayage, freins électriques …). Enfin, si la voiture permet de réduire l’impact climatique, elle a aussi un effet sur l’air, puisqu’elle n’émet pas de gaz toxique. Ce n’est donc pas par négligeable.

Reste l’autonomie, c’est-à-dire la distance maximum que l’on peut parcourir à pleine charge. Un problème qui fait débat alors que, comme le rappelle à juste titre le cabinet de conseil : « 95% des déplacements en voiture ne dépassent jamais 300 km pour l'écrasante majorité des français.es ». Et quand c’est le cas, même si l’objectif des 100 000 bornes publiques fixées par le Gouvernement, en 2021, n’est pas atteint, le parc est en constante augmentation et suit à peu près l’évolution du nombre de véhicules en circulation. Être obligé de recharger en cours de voyage, est aussi un avantage sur le plan de la sécurité puisqu’il permet d’obliger le conducteur à effectuer des pauses et surtout conduire différemment, de manière plus douce, pour économiser la charge. Sans compter que les batteries deviennent de plus en plus performantes. 

La seule difficulté, c’est le prix de la charge. Tout comme les carburants, celle-ci est très couteuse sur les aires d’autoroute, un peu moins sur les autres sites ouverts, à domicile. Même si le prix de l’électricité a fortement augmenté.

Dernier point et non des moindres : est-ce que le réseau électrique sera suffisant pour alimenter toutes les voitures en circulation ? Selon les modélisations faites par RTE l’impact pourrait être absorbé sans difficultés en faisant l’hypothèse d’un pilotage « intelligent » de la charge. La puissance électrique que représenterait sans pilotage la charge de 8 millions de véhicules électrifiés serait de 8 GW lors de la pointe hivernale de 19 h compte tenu du foisonnement de l’utilisation des charges. Le parc électrique français possède une capacité de pointe supérieure à 100 GW. 

Pour plus de détails, notamment sur les données chiffrées : www.carbone4.com

(*) Pour avoir une empreinte carbone exprimée en une unique unité, les autres gaz à effet de serre sont donc tous convertis en quantité de CO2. On parle d' “équivalent CO2”, ou “CO2e” (voire parfois “CO2eq”)





              

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