Pas de Smart City sans gouvernance


le Dimanche 25 Novembre 2018 à 22:11

La Smart City apporte la promesse d’une expérience générale améliorée de la ville. Pourtant, sans gouvernance, elle est vouée à rester un concept. En effet, une telle vision nécessite une véritable réflexion sur l’articulation entre bien commun et bien individuel, à une époque où la logique individuelle prévaut. David Millot Vice-Président Solutions Europe, Moyen-Orient et Afrique chez Software AG en fait la démonstration au travers de cinq cas concrets.


Loin des concepts nébuleux, la concrétisation de la Smart City demande à redéfinir le lien entre les différents acteurs : privés, publics, usagers, consommateurs (Photo GE.com)
Loin des concepts nébuleux, la concrétisation de la Smart City demande à redéfinir le lien entre les différents acteurs : privés, publics, usagers, consommateurs (Photo GE.com)
Le « Smart Parking » qui permet de répondre aux problématiques de stationnement des villes dans lesquelles transitent des flux importants de véhicules, est l’un de premiers cas analysés pas David Millot, Vice-Président Europe de Software AG . Le principe est assez simple puisqu’il permet grâce à un GPS et des capteurs d’emplacement de géolocaliser les places disponibles et de calculer le meilleurs itinéraire pour s’y rendre. Si dans le monde New-York a un plan de mise en place d’un système Smart Parking, en France plusieurs collectivités s’y sont mises avec un impact instantané sur la vie des automobilistes.

« La ville devient plus efficace dans sa gestion du stationnement », explique David Millot. « Si le principe est facile à mettre en place dans les villes modernes, à l’exemple de Dubaï, il l’est beaucoup moins dans les centres-villes historiques comme Paris, Berlin ou Frankfort où les acteurs sont bien plus nombreux ». Pour David Millot, « il s’agit de déterminer qui a la donnée et qui contrôle l’information ». Pour ce dernier les instances politiques ont souvent un rôle déclencheur pour amener le réaménagement et le re-travail des logiques de circulation à l’ordre du jour, en accord avec les directives environnementales. Aux politiques d’orchestrer l’écosystème pour travailler de manière structurée une solution relativement simple techniquement.

« Pour réussir il faut identifier les besoins des citoyens et être à leur écoute pour les rassurer quant aux perspectives rendues possibles par les technologies existantes », conseille David Millot. « Il faut éduquer les citoyens à conserver la maîtrise de leurs données  en leur faisant  prendre conscience du fait que si le service est gratuit, le produit, c’est eux ».
 

La gestion intelligente des déchets

C’est ce qu’on appelle le « Smart Waste Management ». Il s’agit de placer un capteur sur la poubelle, lequel déclenche une collecte si elle est pleine, en fonction de la température, de sa localisation, etc. Ce dispositif permet d’éviter les infections, notamment dans les villes à fortes températures comme Barcelone ou Sidney, lesquelles peuvent avoir un impact économique au niveau du tourisme.

Seule ombre au tableau : le prix. Le matériel de collecte coute cher et se sont souvent des acteurs privés qui collectent et trient des déchets avec des coûts très bas et des services minimaux. S’ajoute la responsabilité du dispositif. « Qui prend en charge le coût des capteurs. Qui va gérer la maintenance de cet équipement connecté plutôt qu’un dispositif simple en plastique  » questionne David Millot. Pour ce dernier « une approche plateforme permet de segmenter les fonctions et les responsabilités ». Il suffit de confier la donnée à un tiers dont la responsabilité est de traiter cette donnée plutôt qu’aux entreprises d’éboueurs. Il faut également penser les capteurs de remplissage et de toxicité de manière modulaire car les usages vont évoluer dans le temps. « Anticiper est important pour ne pas se retrouver dans une impasse technologique », ajoute David Millot.

L’éclairage intelligent

Appelé « Smart Lighting », l’éclairage intelligent est un sytème d’éclairage public couplé à un détecteur de présence et de mouvement, qui lui permet de s’allumer lors d’une présence ou d’un passage. Ce dispositif augmente la durée de vie des éclairages toute en réduisant la consommation d’électricité. L’un des principaux freins à l’adoption est la crainte d’insécurité de la part de certains riverains.

En matière de gouvernance, « qui prend en charge le coût des ampoules intelligentes et connectées. Quel est le niveau de sécurisation nécessaire et qui en décide », questionne David Millot. « Des essais en cours sont réussis mais cela bloque souvent au niveau des donneurs d’ordre au moment de généraliser le système, sauf quand le Smart Lighting est lié à d’autres projets de Smart City du type Smart Parking ou Smart Trafic. Ce qui renforce le sentiment général de sécurité ». Pour le Vice-Président Europe de Software AG, « il faut inscrire la sécurité au cœur des politiques publiques et du Système d’Information, à l’aide notamment du recrutement de Responsables de la sécurité des systèmes d’information et de l’intégration systématique de la sécurité dans les schémas directeurs des systèmes d’information ».

Le réseau électrique intelligent

Appelé Smart Grid , le réseau électrique intelligent permet l’ajustement en temps réel de la production et de la distribution de l’électricité, en hiérarchisant les besoins de consommation selon leur urgence. Son avantage principal est la répartition optimale de la consommation d’énergie au sein d’une ville sans augmenter la masse totale d’énergie produite. Seul frein à l’adoption d’un réseau électrique intelligent : la protection des données. « Les nouvelles directives européennes qui séparent les fournisseurs d’énergie et ne rendent pas la communication facile », avance David Millot.

La question qui se pose c’est de savoir comment s’opère l’arbitrage entre les différents bâtiments ? Qui est décisionnaire ? Quid de la protection des données ? Les constructeurs de bâtiment ont un rôle majeur à jouer. « On se souvient encore de la canicule de 2003 en France… Il faut être au clair sur les objectifs et anticiper des usages imprévus qui vont avec le réchauffement climatique et l’ensemble des chaînes de valeurs identifiées aujourd’hui afin d’éviter de se retrouver dans une impasse demain », conseille David Millot.

Le contrôle intelligent du trafic

C’est ce qu’on appelle le « Smart Traffic Control » . Il est utilisé dans les aéroports, pour ouvrir les portes plus ou moins rapidement afin de fluidifier les flux de passagers. Il est également utilisé dans les villes avec le contrôle des feux tricolores à distance afin d’optimiser le trafic routier. Son principal avantage, c’est d’éliminer ou réduire les embouteillages, avec un frein de taille : la peur de la centralisation de l’information et son piratage potentiel.

En matière de gouvernance, «  toucher au trafic est un sujet éminemment politique et risqué », souligne David Millot. Plusieurs organismes de contrôle, des critères de succès divergents (vitesse de déplacement, pollution générée, sécurité, engorgement ou pas, temps de livraison, coexistence avec les piétons, transports en commun, …) rendent l’équation complexe et les arbitrages malaisés. « D’un autre côté, bien mené, c’est la clé du succès pour rendre les villes plus accessibles et plus vivables, avec un impact visible et mesurable pour tous les habitants et les visiteurs », appuie David Millot. « Techniquement, des données sont pré-existantes. Il existe déjà des salles de contrôle de trafic avec caméras vidéo dans les villes mais ces données sont peu ou pas exploitées et il ne faut pas inonder les opérateurs sans exploiter à 100% les capacités d’un système de smart trafic », pour le Vice-président de Software AG Europe, « il faut anticiper les modules à déployer à terme , en utilisant l’Intelligence Artificielle (IA) et la robotisation pour focaliser l’intelligence humaine là où il y a des décisions à prendre ». L’enjeu est de trouver le bon mélange entre l’IA, la robotique et l’humain… car il semble difficile de s’abstenir de l’humain.

 En définitive, loin des concepts nébuleux, la concrétisation de la Smart City demande à redéfinir le lien entre les différents acteurs : privés, publics, usagers, consommateurs. Si les algorithmes permettent de pré-opérer un arbitrage, c’est encore et toujours l’humain qui doit en décider les fondations, ainsi que les ultimes conséquences et les assumer. « Les villes ne deviendront pas intelligentes toutes seules. La Smart City se fera par l’Humain, pour l’Humain et avec des moyens humains. Le Robot Process Automation ne fera que porter ces choix », conclut David Millot.





              

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